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La forêt a-t-elle autrefois couvert tout le Sénégal ?

Publié le 12.12.2012 par Bernadette Gilbertas - Voir les commentaires

Extrait du livre « Haidar El Ali, itinéraire d’un écologiste au Sénégal » Bernadette Gilbertas, éditions Terre Vivante

« La forêt a-t-elle autrefois couvert tout le Sénégal ? »

Écoute : dans les années 50, mes parents, revenant de Dakar, s’en allaient à Louga (Louga est à 200 kilomètres au nord de Dakar). Ils roulaient sur une piste étroite, au milieu de la forêt, quand ils ont tamponné une panthère. Ils n’osaient pas la dépasser, tant la forêt en plein jour était sombre.

En Europe, la conscience de la nécessité de protéger les forêts est arrivée à peu près en même temps que la technologie, si destructrice. Chez nous, la tronçonneuse est arrivée alors que la conscience n’était pas réveillée. La tronçonneuse a donc coupé les arbres à une vitesse « grand V », exploitant la ressource sans aucune gestion politique ou vision durable. D’un coup, c’était si facile d’accéder à la ressource, au bois, que les gens se sont mis à produire facilement le charbon, le bois de chauffe, le bois d’œuvre ou le djembé, par exemple.

« Avant les années 70, il y avait beaucoup de forêts ici ? »

Non, mais quand même, c’était boisé ; on trouvait encore beaucoup d’arbres au milieu de la savane, de grandes forêts sèches. » En effet, le nord et le centre du pays sont essentiellement couverts de savanes arbustives et arborées sur les zones bioclimatiques des domaines sahélien et soudanien. Les forêts claires et les reliques de forêts denses ne se rencontrent qu’au sud, en Casamance et à l’est. Elles concentrent, dans ces deux régions, 90 % du potentiel forestier.

Depuis que le prix du baril de pétrole n’a cessé d’augmenter, le Sénégal, plus encore que tous les autres pays de la sous-région (le Sénégal a le plus fort taux d’urbanisation dans la zone sahélienne), a connu une dégradation prononcée de ses ressources forestières, lesquelles constituent la principale source d’énergie encore accessible pour la majorité des populations.

Le Fonds des Nations unies pour l’alimentation (FAO) déclare que le Sénégal perd chaque année environ 45 000 hectares de forêt. La récession climatique, les feux de brousse et la compétition des terrains agricoles dominés, pendant les cinquante dernières années, par la culture de l’arachide, sont les causes principales du recul des formations forestières qui recouvrent encore 25 % du territoire sénégalais.

La pression exercée par l’exploitation forestière pour approvisionner en combustibles ligneux les agglomérations urbaines est de plus en plus reconnue comme la cause majeure de la disparition des forêts au Sénégal. Le charbon de bois représente près de 90 % de l’énergie domestique et plus de 48 % de l’énergie nationale. Malgré leur statut juridique caractérisé par la restriction réglementaire de leur usage, les forêts classées n’échappent pas au processus de dégradation des ressources. La réglementation est constamment violée par les populations confrontées souvent à des problèmes aigus de subsistance.

La « véritable banque verte » que fut la forêt sénégalaise est en train de perdre ses précieuses économies.

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